mardi 25 octobre 2011

L' avortement un "droit" promotionnel ?!


    Alors que le gouvernement étend l’accès à l’IVG sans tenir compte des souffrances qu’elle entraîne, les femmes estiment que l’avortement laisse des traces psychologiques difficiles à vivre pour elles. Il est aujourd’hui temps de lever le tabou sur la souffrance liée à l’IVG et d’aider les femmes à la surmonter.




     La réalité statistique de l’avortement appelle à la mise en place d’une véritable politique d’aide aux femmes enceintes. Or, le gouvernement a décidé de continuer à mener, sans prendre en compte ni les causes, ni les conséquences de l’avortement, des campagnes "promotionnelle" en faveur de l' IVG !


Pour répondre aux attentes profondes des femmes, il est urgent de promouvoir une alternative à l’IVG.



Campagne

Aux larmes citoyennes (vidéo) par fautpaspousser-malo17




Info articles :
Billet à retrouver sur Facebook


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lundi 24 octobre 2011

Quels défis pour un couple aujourd'hui ?


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Conférence de Monique Baujard 


    Monique Baujard, directrice du service national Famille et Société de la Conférence des évêques de France, a donné une conférence lors du colloque intitulé « La mission (impossible) du couple ? » qui a eu lieu les 11 et 12 décembre 2010 à Bordeaux. Cette rencontre inaugurait « Familles 2011 », une réflexion lancée par le Conseil épiscopal Famille et Société, présidé par Mgr Jean-Charles Descubes, archevêque de Rouen, pour nourrir le débat dans la société sur ce thème.Texte de la Conférence des évêques de France (*)

    Devant le nombre impressionnant de divorces – un mariage sur trois, voire un mariage sur deux dans les grandes villes –, il est possible de se demander si vivre en couple est plus difficile aujourd'hui qu'hier. La réponse est probablement oui et non. Non, car aimer en vérité a toujours été difficile. Depuis toujours, les couples connaissent des avis de tempêtes et des traversées du désert. Cela n'a pas changé. Mais en même temps la réponse est oui, car le monde a changé rapidement en l'espace de cinquante ans et cela affecte nos modes de vie, y compris dans le domaine familial. Mon propos ce matin sera de pointer quelques-uns de ces changements dans la société qui affectent directement la vie du couple. Il ne s'agit pas de problèmes insurmontables mais plutôt de difficultés dont il faut avoir conscience pour ne pas se laisser piéger dans sa vie de couple.
Auparavant, je voudrais dire quelques mots de l'initiative « Familles 2011 », lancée par le Conseil Famille et Société de la Conférence des évêques de France, et dans laquelle s'inscrit le présent colloque.

Familles 2011

     Pourquoi se pencher sur la famille ? Le constat qui motive notre démarche est le suivant : d'un côté, la famille apparaît, dans tous les sondages, comme la clé du bonheur, de l'autre, elle n'a jamais paru aussi fragile. Comment alors aider toutes les personnes à construire la vie de famille harmonieuse à laquelle elles aspirent ? Il nous a semblé qu'il convenait d'abord analyser la situation actuelle. Les familles ont pris des visages multiples et le mariage n'est plus le seul lien juridique qui les soutient. En même temps, de très nombreux acteurs soulignent l'importance de la famille, à la fois pour la construction de la personne et pour la société. Comprendre les évolutions dans la société et mettre en valeur le rôle des familles sont alors les deux premiers objectifs. Ensuite, il nous a semblé important d'écouter les familles. Les colloques, comme celui-ci, sont un des moyens de faire remonter des questions et des préoccupations des familles. D'autres colloques auront lieu à Lille et à Strasbourg (a) et plusieurs autres diocèses organisent des rencontres. Cette écoute passe aussi par le blog que nous avons ouvert (b). À partir de tous les éléments que nous aurons recueillis, nous souhaitons penser, à frais nouveaux, comment l'Évangile peut rejoindre aussi toutes les familles sur leur chemin. Notre démarche s'inspire clairement de la pédagogie du Christ sur le chemin d'Emmaüs. Les pèlerins d'Emmaüs sont des personnes déçues, désorientées, qui décident de partir car elles ont perdu tout espoir. Le Christ ne les condamne pas, il ne les force pas non plus de revenir à Jérusalem. Il prend l'initiative de les rejoindre sur le chemin, il s'intéresse à eux et demande ce qui les préoccupe. Il écoute leur histoire et ce n'est qu'après les avoir écoutés qu'il propose l'éclairage des Écritures. Il faut le temps du trajet jusqu'à Emmaüs, puis encore le temps et les gestes du repas pour que les pèlerins le reconnaissent. Il disparaît alors et c'est de leur propre gré que les pèlerins décident de repartir vers Jérusalem. Aujourd'hui, beaucoup de personnes sont déçues et désorientées devant les difficultés inhérentes à la vie de famille. Elles ne voient plus comment le message de l'Évangile peut les aider dans leur vie quotidienne. Certaines personnes quittent l'Église dont elles n'espèrent plus rien ; d'autres « s'auto-excluent » de l'Église au motif que leur situation familiale n'est pas conforme au modèle classique ; d'autres encore n'ont jamais été initiées à la vie chrétienne et ne pensent pas qu'il y ait quoi que ce soit à attendre de l'Église catholique en matière de famille.
    Le défi pour l'Église est donc énorme. Il s'agit d'encourager toutes les personnes à prendre soin de leur famille. Il s'agit de donner confiance aux familles qui, malgré les difficultés de la vie, ont un rôle important à jouer, un rôle d'humanisation à la fois pour les adultes et pour les enfants. Il s'agit de faire comprendre que le message de l'Évangile peut aider chacun, quelle que soit sa situation familiale, à faire quelque chose de beau de sa vie au quotidien, à mieux vivre ses relations de famille et même à les inscrire dans le temps. Car le Christ nous apprend qu'aimer c'est se donner pour se recevoir de l'autre. Et toute personne est invitée à entrer dans cette dynamique. Au bout de l'année 2011, nous espérons pouvoir proposer quelques éléments pour une politique familiale et une pastorale des familles.
Revenons au sujet de ce matin : la mission (impossible) du couple. Si les familles ont pris des visages diversifiés, c'est parce que les couples n'arrivent plus à inscrire leur lien dans le temps. À cet égard, quatre points méritent, me semble-t-il, une attention particulière : assumer son choix ; gérer le temps ; réinventer l'équilibre entre homme et femme ; prendre de la distance par rapport à l'air du temps.

1. Assumer son choix

     Assumer son choix dans le mariage n'a pas l'air nouveau. Il a toujours fallu choisir entre Pierre, Paul et Jean. Et le fait d'avoir choisi Pierre ne diminuait pas pour autant les charmes de Paul et de Jean, de sorte que les problèmes de fidélité dans un couple existent depuis la nuit des temps. Mais, jusqu'à une époque récente, le choix était le choix du partenaire ; la question de la fidélité était celle de la fidélité à son conjoint, à l'autre. Le mariage en tant que tel avait une forme prédéfinie, la répartition des rôles homme/femme était connue d'avance. Certes, tout le monde ne se mariait pas mais c'était quand même le choix de la très grande majorité. À côté, il y avait le choix de la vie religieuse ou celui, peu valorisé, de rester célibataire. Enfin, en cas de crise dans un mariage, il y avait toujours la grand-mère pour expliquer que, certes, les hommes sont compliqués, mais qu'avec un peu de patience les choses s'arrangeraient.
Aujourd'hui, la question se pose différemment. Tout dans la vie est devenu objet de choix et la question de la fidélité est, avant tout, celle de la fidélité à soi-même. Cette évolution est complexe et due à de multiples facteurs.
La sécularisation a mis l'accent sur l'autonomie de l'homme. L'autonomie est une valeur importante pour l'homme moderne, ou postmoderne. Il estime désormais qu'il est seul à décider et qu'il ne doit de comptes qu'à lui-même. Il ne dépend pas d'un Dieu et le moins possible des autres hommes. La perte d'autonomie est de plus en plus perçue comme une atteinte à la dignité humaine.

    L'individualisme a mis l'accent sur la liberté de l'homme. Il est non seulement seul à décider, mais il est libre de choisir ce qui lui convient. Il est un être unique qui n'a plus besoin de se conformer à des traditions familiales, sociales ou religieuses. Il est libre de choisir un autre métier que celui de son père, un autre parti politique que celui de sa classe sociale et une autre Église que celle de son enfance.
    La mondialisation et le développement extraordinaire des moyens de communication modernes ont fait découvrir d'autres cultures et styles de vie, ce qui a contribué à relativiser ce qui a cours chez nous. Le choix a donc augmenté de façon vertigineuse. Les possibilités sont aujourd'hui illimitées. L'homme autonome passe son temps à faire des libres choix.
    L'économie libérale, enfin, avec sa logique de marché, a tendance à régir non seulement les échanges de biens de consommation mais à déteindre sur tous les autres domaines de la vie. La loi de l'offre et de la demande semble la seule à pouvoir guider les personnes dans leurs choix multiples. Il y a ainsi le marché du travail, de l'art et, dans un certain sens, aussi celui des valeurs spirituelles. Tous les aspects de la vie semblent ainsi englobés dans une logique économique, une recherche continuelle du meilleur rapport qualité/prix.
    Les psychologues soulignent que la tâche d'avoir à choisir sa vie, d'avoir à « l'autovalider », ou d'avoir à la faire reconnaître par autrui, se paie souvent en angoisse et en fatigue psychique, surtout chez les jeunes. Ils insistent aussi sur la difficulté qui en résulte pour certains à s'approprier leur histoire, à prendre conscience du poids de leurs actes et de leur impact sur l'autre.
    Cette évolution n'est, bien sûr, pas sans incidence sur la vie des couples. Là aussi, les choix se multiplient : vivre seul(e) ou avec quelqu'un ? Avec quelqu'un de l'autre sexe ou du même sexe ? De façon provisoire ou durable ? En concubinage ou en optant pour une formule juridique ? Formule Pacs ou mariage ? Mariage civil ou aussi religieux ? Tous ces choix existent et les choix que chacun fait seront constitutifs de son identité. Cela augmente considérablement la fragilité des couples. La question n'est plus de savoir si je délaisse Pierre pour Paul ou Jean, mais si je pense qu'en poursuivant ma vie de couple, j'arrive à préserver mon identité et à continuer à me construire dans le sens qui me paraît le mieux. En d'autres mots, il y a une individualisation des trajectoires qui pousse chacun à sauvegarder d'abord sa propre identité avant de se préoccuper de l'autre. Cela ne veut pas dire que les gens sont devenus plus égoïstes qu'avant. Cela veut simplement dire que les identités sont plus fragiles qu'avant et qu'il convient de prendre en considération cette fragilité de soi et de l'autre si on veut essayer d'inscrire une relation de couple dans le temps. Car la relation d'amour dans laquelle le Christ nous invite à entrer est une relation de don de soi et de réception de l'autre. Cela implique un minimum de confiance en soi et en l'autre, car l'on donne sans savoir ce que l'on va recevoir. Aimer, c'est prendre des risques, se montrer vulnérable. Une trop grande fragilité peut empêcher des personnes de prendre de tels risques.

2. Gérer le temps

     À cette fragilité des identités, s'ajoute la pression du temps. Pour le sociologue allemand Hartmut Rosa, ce qui caractérise vraiment notre époque, c'est l'accélération (1). Une accélération qui aurait débuté vers les années 1970, mais qui se serait imposée à grande échelle à partir de 1989 par l'effet conjugué de trois révolutions : la révolution politique avec l'effondrement du système soviétique ; la révolution numérique avec le développement d'Internet ; la révolution économique avec les productions « just in time  ». Il s'agit bien d'un effet conjugué car la disparition de l'empire soviétique a rendu possibles des interconnexions dans le domaine de l'économie et des technologies de communication qui, à leur tour, ont transformé les modes de production. Il en résulte un bouleversement dans notre appréhension du temps et de l'espace. Nous avons souvent cette impression que tout va plus vite. Certes, le développement de la technologie nous permet de gagner beaucoup de temps et l'électroménager a considérablement réduit le temps nécessaire pour les tâches domestiques. Mais il reste cette impression que nous n'avons pas le temps, nous sommes toujours pressés. Bien sûr, un cadre qui travaille dans une grande multinationale et qui reçoit à longueur de journée des mails en provenance du monde entier sur son Blackberry ressentira davantage la pression du temps qu'un couple de retraités qui vit à la campagne. Mais tous, nous pouvons constater la perte des rythmes des événements sociaux et la disparition des séquences chronologiques fixes et stables. Par exemple, les fruits et légumes sont disponibles toute l'année et ne sont plus liés à des saisons. Ou encore, il est possible de faire ses courses tous les jours de la semaine et même de nuit par Internet. L'ordinateur et les téléphones portables font que la vie professionnelle envahit la vie privée et inversement. L'apprentissage d'un métier se faisait lorsqu'on était jeune, aujourd'hui la formation professionnelle se fait tout au long de la vie. Les séquences temporelles pour telle ou telle activité ne sont donc plus fixes.
Ce bouleversement du temps bouleverse aussi nos vies, y compris nos vies de famille. Le fait que les événements ne se suivent pas dans le temps mais sont présents de façon simultanée serait à l'origine d'un certain nombre de phénomènes sociaux comme (2) :

· Le caractère de plus en plus éphémère et transitoire des modes, des biens, des carrières, des méthodes de travail, des idées, des images, de la nature, des valeurs et des relations.

· L'augmentation des contrats de travail à durée déterminée.

· Le taux élevé de divorces et d'autres formes de dissolution des ménages.

· La perte de la confiance et de la solidarité intergénérationnelle.

· La volatilisation croissante des comportements électoraux en politique.

· Le sentiment d'un rythme de vie trop élevé qui rentre en contradiction avec l'expérience humaine fondamentale.

    La vie humaine était en effet organisée en séquences chronologiques. C'était vrai pour la vie professionnelle : formation, activité professionnelle, retraite. C'était vrai aussi pour la vie familiale : enfance au foyer familial, nouveau foyer avec enfants, phase du troisième âge après le départ des enfants. Aujourd'hui, avec la démultiplication des choix, toutes les combinaisons sont possibles. Le métier, la famille, la religion, l'appartenance politique, le lieu de résidence, voire la nationalité ou l'identité sexuelle, sont l'objet d'un choix possible. Sous l'influence de la sécularisation et de l'individualisation, ces choix se faisaient déjà librement mais jusqu'à il y a peu de temps, ils étaient faits pour la vie entière. Le changement de profession, le divorce, la conversion religieuse ou le changement de bord politique existaient, mais étaient l'exception et ils étaient alors intégrés comme une révision ou une progression dans un projet de vie. Ce qui change aujourd'hui, c'est que la famille, le travail, les appartenances religieuses ou politiques, ou encore les réseaux d'amis font bien objet d'un choix mais d'un choix non définitif. Tout choix est provisoire, révisable à tout moment par la personne elle-même ou par d'autres. On assiste ainsi, selon l'expression des sociologues, à une « temporalisation de l'identité personnelle », qui fait que toutes les positions et décisions fondatrices de l'identité cessent de se rapporter à l'être pour se rapporter au temps. Concrètement, cela donne quelqu'un qui dit : aujourd'hui, je suis catholique, demain, je serai peut-être bouddhiste. Ou encore : aujourd'hui je vis avec quelqu'un, demain on verra. L'identité de la personne ne s'établit donc plus à partir d'un projet de vie orienté vers la stabilité. Pire, ce choix de vie serait intenable dans la modernité avancée. Seuls pourraient survivre dans l'accélération les personnes qui optent pour une identité flexible, disposée au changement permanent.
    Les conséquences pour les familles sont énormes. Avant la modernité, les structures familiales et professionnelles restaient stables à l'échelle intergénérationnelle. Dans la modernité dite « classique », les structures familiales et les métiers changeaient au rythme des générations : fonder une famille et choisir un métier étaient des choix individuels et fondateurs de l'identité. Chaque génération était ainsi un vecteur d'innovation. Dans la modernité avancée ou tardive, les structures familiales et professionnelles changent à un rythme plus rapide que l'alternance des générations : une succession d'activités (jobs) remplace le métier ; une série de compagnons pour des périodes plus ou moins longues remplace le conjoint pour la vie entière (3).
Cette temporalisation de l'identité personnelle a donc pour conséquence de relativiser, voire de dévaloriser l'inscription de nos relations dans le temps. Et cela n'est donc pas seulement le fait d'une instabilité sentimentale personnelle mais d'un mouvement d'accélération de la vie sociale qui déstabilise les identités personnelles.
Pour quelqu'un qui vit entre New York, Shanghai et Abu Dhabi, qui passe ses vacances au Brésil ou à l'Île Maurice et qui est, de temps en temps, de passage dans son pied-à-terre parisien, être marié et avoir des enfants obligent à une immobilité géographique et un investissement en temps qui peuvent lui paraître comme des sacrifices hors de proportion avec les bénéfices qu'il pourrait en retirer. Certes, peu de personnes vivent dans ce rythme hyper-accéléré. Mais ce rythme s'impose néanmoins à la vie économique et sociale et nous en subissons les conséquences.
Comment maintenir alors un couple si l'inscription de la relation dans le temps n'a plus de valeur ? Est-il encore possible de faire l'expérience de l'amour chrétien qui, justement, ne peut se déployer que dans la durée ? À vrai dire, malgré l'accélération de la vie, beaucoup de personnes et notamment les jeunes plébiscitent l'idée d'un grand amour qui dure toute la vie. Celui-ci aussi est devenu l'objet d'un choix. Un choix de défier le temps et même de faire du temps son allié dans la vie de couple. Il faut alors, pour reprendre le vocabulaire du sociologue allemand, créer des « îlots de décélération » (4). La famille peut être un tel îlot de décélération, un espace où l'on veille à ne pas se laisser bousculer par le temps mais où l'on prend le temps les uns pour les autres, du temps gratuit, donné, n'ayant d'autre « utilité » que de le passer en compagnie de ceux qu'on aime. Entrer dans une relation de don de soi et de réception de l'autre ne se fait pas de façon instantanée. Bien au contraire, cela prend beaucoup de temps, une vie humaine n'y suffit peut-être pas ! Apprivoiser le temps pour en faire un allié de la vie de famille devient certainement un des grands défis pour les couples aujourd'hui.

3. Réinventer l'équilibre homme/femme

     La combinaison de la maîtrise de la fécondité et du travail rémunéré des femmes a définitivement changé l'équilibre dans les rapports homme/femme. Certains le regrettent peut-être, mais dans leur très grande majorité, ni les femmes ni même les hommes ne souhaitent revenir en arrière. À cette indépendance que les femmes ont acquise, il faut ajouter l'effacement des rôles traditionnels. Le poids de la tradition a disparu dans de nombreux domaines sous l'influence, citée précédemment, de la sécularisation et de l'individualisation. Lorsque tout est devenu objet de choix, les rôles dans la famille aussi sont devenus objets de choix. Et enfin, certains mouvements féministes ont très clairement milité pour que la femme sorte de son rôle traditionnel et que les tâches ménagères soient plus équitablement partagées. Cette évolution n'est pas sans influence sur les couples qui ont aujourd'hui à gérer au moins trois questions qui ne se posaient pas auparavant.
     D'abord, il y a la gestion du quotidien. Avant c'était le domaine réservé de la femme. Aujourd'hui chacun décide librement de la répartition des tâches. C'est bien, mais les psychologues récoltent les difficultés des jeunes couples qui passent leur temps à tout négocier : qui amène les enfants à l'école, qui fait les courses, qui fait la cuisine, qui fait les conduites aux activités sportives, qui fait le jardin, etc. Il arrive désormais que des couples s'épuisent dans cette négociation du quotidien.
     Ensuite, lorsqu'il y a plusieurs enfants, il y a le maintien d'une activité professionnelle pour chacun des époux. Souvent, pour préserver du temps pour la famille et l'éducation des enfants, un des deux conjoints sera amené à réduire son temps de travail ou à arrêter toute activité professionnelle. Un « sacrifice » pour lequel la société n'exprimera aucune reconnaissance. Le temps consacré à la famille n'est pas rentable économiquement : vous ne gagnez pas d'argent et vous ne faites pas carrière. Et sacrifier sa carrière à sa famille paraît aller à l'encontre du paradigme de l'épanouissement personnel. En fait, le temps consacré à la famille est « rentable » humainement et notre épanouissement personnel ne peut se faire indépendamment des autres et encore moins au détriment des autres. Il faut donc espérer qu'avec le développement de nouveaux indicateurs du bonheur et du développement humain (5), la société arrivera à mieux prendre en considération les éléments non économiques de la vie des familles et à valoriser le temps qui y est investi (c). En attendant, les couples ont besoin de prendre conscience de cette difficulté et à assumer à deux les choix qu'ils feront pour éviter une source de conflit supplémentaire.
    Enfin, il y a la question de l'indépendance. Aujourd'hui dans un couple, chacun tient à son indépendance et son autonomie. Mais, en même temps, il n'y a pas de relation d'amour sans dépendance. À nouveau, la relation dans laquelle le Christ nous invite à entrer est une relation dynamique de don de soi et de réception de l'autre. Elle demande une grande confiance réciproque. On donne, on reçoit, on redonne… Petit à petit, cette dynamique crée un rapprochement de ceux qui s'aiment et une vraie dépendance. On devient dépendant du regard, des paroles, de la présence de l'autre. Dans une relation d'amour saine, cette dépendance n'est pas problématique. Mais un trop grand souci d'indépendance peut aujourd'hui freiner cet élan et, là encore, empêcher les personnes à entrer dans la profondeur d'un amour véritable.

4. Prendre de la distance par rapport à l'air du temps

    C'est peut-être le point le moins nouveau. Il est probable que, de tout temps, il a fallu prendre une certaine distance par rapport aux choses de ce monde si on voulait vivre un amour chrétien. Ce qui change d'une époque à l'autre, c'est ce dont il faut prendre distance. Le leitmotiv de la société actuelle a été résumé récemment par un universitaire italien (6) en trois points : consommer, se divertir, rester jeunes. Cela ressemble étrangement au « panem et circenses  » de la Rome antique, auquel on aurait rajouté l'impératif de rester jeunes.
    Consommer, se divertir et rester jeunes : il est possible de remplir sa vie avec cela, mais le risque est alors de se préoccuper beaucoup de soi et peu des autres. Pour la vie de couple, cela ne peut être bénéfique.
Pour prendre cette distance salutaire par rapport à la société de consommation, je me réfère à la réflexion d'un évêque néerlandais, Mgr van Luyn, qui a proposé il y a une dizaine d'années déjà aux catholiques de son diocèse de Rotterdam, de se laisser guider par trois « S ». Le premier « S » est celui de Spiritualité, qui vise notre rapport à Dieu. Le deuxième « S » est celui de Solidarité qui concerne notre rapport aux autres. Les deux ensemble correspondent au double commandement du Christ d'aimer Dieu et d'aimer son prochain. Mais, pour pouvoir trouver dans nos vies aujourd'hui le temps et l'espace pour Dieu et pour les autres, Mgr van Luyn estime que nous avons besoin d'un troisième « S » qui est celui de Sobriété. Trouver un style de vie plus sobre ne veut pas dire un style de vie triste. Ce n'est pas non plus un refus de la consommation. Il s'agit seulement de trouver une juste distance par rapport aux impératifs de consommation et de divertissement, pour que les dimensions relationnelles et spirituelles puissent aussi trouver leur place dans nos vies. À l'évidence, ces dimensions sont nécessaires pour réussir sa vie de couple.
    En conclusion, entre les identités plus fragiles qui peuvent handicaper les engagements à long terme, l'obligation d'apprivoiser le temps pour en faire un allié plutôt qu'un ennemi, le réaménagement des rôles entre époux et la pression de la société de consommation, les couples aujourd'hui doivent avoir conscience que leur mission n'est pas impossible mais qu'elle ne va pas non plus de soi. Faire durer son couple relève désormais d'un choix délibéré pour lequel il faut se donner les moyens, tout en sachant que ce choix n'est plus du tout porté par la société.

Le blog de « Familles 2011 »
    Pour l'Année de la famille, le Service national Famille et Société de l'Église catholique en France a ouvert un blog (7). Au fil des semaines et des billets, sociologues, philosophes, théologiens, psychologues, juristes, élus locaux, membres d'ONG, familles apportent leur témoignage et leur éclairage sur ce que vivent les familles. Le site permet une interactivité, favorisant l'expression de réactions et de questions.

La famille en DVD
Le Jour du Seigneur propose un DVD intitulé La famille, regroupant les cinq documentaires diffusés sur France 2 pendant le Carême 2011. Les cinq réalisatrices ont réussi à établir un vrai lien de confiance avec des familles pour aborder avec elles des sujets intimes et sensibles. Des témoignages uniques qui permettent de comprendre et donner sens à l'expression « faire famille ».


(*) Notes (a) à (c) de La DC.
(a) À Lille, le 26 mars 2012 et à Strasbourg, les 14-15 mai 2012.
(b) Voir l'encadré p. 542.
(1) Accélération, Hartmut Rosa, Paris, La Découverte, 2010.
(2) Idem.
(3) Idem, p. 352.
(4) Idem p. 108 et suiv.
(5) Voir sur ce sujet, par exemple, Oser un nouveau développement, Justice et Paix-France, Bayard, 2010.
(c) Voir le rapport de la Commisssion sur la Mesure de la performance économique et du progrès social sur le site www.stiglitz-sen-fitoussi.fr/fr/index.htm.
(6) Le monstre doux, Raffaele Simone, Gallimard, 2010.
(7) www.blogfamilles2011.fr



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dimanche 23 octobre 2011

Pour une autre prévention de l’avortement en France

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Aux larmes citoyennes (musique) par fautpaspousser-malo17




A la suite du rapport de l’Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS), rendu public en février 2010, AllianceVITA a voulu connaître l’avis des Françaises sur le sujet sensible de l’avortement, qui la mobilise sur le terrain de l’aide aux femmes enceintes ou ayant déjà vécu l’IVG. 

Elle a commandité un sondage détaillé à l’IFOP, réalisé du 19 au 23 février 2010 auprès d’un échantillon représentatif de 1006 femmes âgées de 18 ans et plus. 

L’Alliance en tire quatre enseignements majeurs :

1/ L’avortement n’a rien d’anodin pour les femmes : la plupart des Françaises estiment qu’il y en a trop, qu’il a des conséquences difficiles à vivre et aimeraient que la société les aide à l’éviter. 

Les Françaises se disent très majoritairement favorables à un « droit à l’avortement » (85%). Ce n’est pas l’avis de l’Alliance qui se retrouve clairement du côté des 7% des sondées qui n’y sont pas favorables. Mais ce constat ne clôt pas le débat, car l’Alliance se retrouve sur d’autres questions avec une nette majorité des Françaises :

-          pour 61% des Françaises (contre 33%) « il y a trop d’avortements dans notre pays » ; 
-          pour 83%, « l’avortement laisse des traces psychologiques difficiles à vivre pour les femmes » ;
-          pour 60% (contre 33%) « la société devrait davantage aider les femmes à éviter le recours à l’IVG ». 

Pour l’Alliance pour les Droits de la Vie, l’avortement est un drame personnel et un échec social, et les pouvoirs publics ont raison de s’en préoccuper. On ne peut pas se satisfaire que près de 4 Françaises sur 10 aient recours à l’IVG au moins une fois dans leur vie féconde (donnée de l’Institut national d’études démographiques). 

A ce titre, les Françaises ne suivent donc pas les associations qui affirment que le fort taux d’IVG ne pose pas de problème et qu’il ne faut pas en faire un drame. Et 54% désapprouvent leur action quand elles « organisent des solutions pour que les femmes puissent avorter à l’étranger au-delà du délai légal ». L’Alliance pour les Droits de la Vie conteste également ces filières d’avortement tardif ouvertement revendiquées, qui ont fait scandale en Espagne ces derniers temps. 

2/ Les Françaises sont favorables à une autre politique de prévention de l’avortement, qui ne se réduise pas à « prévenir les grossesses non souhaitées » mais qui tende à aider les femmes enceintes à éviter l’IVG. 




Alors que les pouvoirs publics reconnaissent qu’il y a un nombre élevé d’IVG, les solutions qu’ils proposent se bornent à renforcer la contraception – alors que la France est l’un des pays au monde où elle est le plus répandue – ou à augmenter encore les prescripteurs de l’IVG. C’est le sens des récentes annonces du ministère de la Santé. 

Or, selon le « paradoxe contraceptif français », 72% des femmes recourant à l’IVG utilisaient une méthode de contraception lorsqu’elles se sont retrouvées enceintes. L’Alliance a donc voulu connaître l’avis des Françaises sur la grande absente des politiques de prévention : l’aide aux femmes enceintes leur permettant d’éviter l’IVG. La  plupart des Françaises soutiennent cette perspective :                   "Je suis enceinte"    

-          47% (et jusqu’à 58% des 18-24 ans) notent que sa « situation matérielle » est « l’influence principale qui pousse une femme à recourir à l’IVG ». Dans un pays développé, dont le système social est réputé performant, on peut pointer les efforts qui restent à faire pour qu’aucune femme ne se sente contrainte à avorter en raison de problèmes économiques. Seulement 13% des femmes affirment que celles qui décident de recourir à l’IVG ne subissent aucune influence. L’expérience d’écoute de l’Alliance confirme que des avis extérieurs (compagnon, proches, professionnels) poussent souvent une femme à avorter à contrecœur.
-          Confirmation : pour 55% des Françaises, « un soutien psychologique pour se protéger des influences extérieures » pourrait aider une femme qui découvre qu’elle est enceinte sans l’avoir souhaité à éviter une Interruption Volontaire de Grossesse. 
-          54% évoquent « Une information sur les aides matérielles auxquelles elle a droit ». 
-          A noter que 27% d’entres elles ajoutent « l’assurance de ne pas être discriminée dans son emploi », un problème récemment soulevé par la Halde qui a lancé en janvier une campagne sur le droit des femmes enceintes. 
-          Par ailleurs, la moitié des sondées évoquent « une discussion avec des professionnels de santé sur les conséquences de ce choix ». 

Ces réponses montrent qu’il y a une place pour éviter trop de décisions hâtives, sous diverses contraintes et qui font de l’IVG – dans bien des cas selon l’expérience de l’Alliance pour les Droits de la Vie – une issue automatique que les femmes auraient pu et voulu éviter. 

Ces réponses sont également cohérentes avec l’avis des Françaises sur le livret d’information remis à la consultation pré-IVG : 

-          83% d’entre elles (contre seulement 13%) sont favorables à ce qu’y figure « le détail des aides aux femmes enceintes et aux jeunes mères ». L’Alliance dénonce le glissement progressif qui a effacé du dispositif de l’IVG, sous la pression de certaines associations, l’ensemble de ces informations. 

La pétition qu’elle a lancée en févier 2010 www.auxlarmescitoyennes.org se trouve cautionnée par ce sondage. C’est une question de justice sociale.

3/ Faire connaître la possibilité de confier un enfant à l’adoption : une perspective ouverte. 

L’Alliance a l’expérience de l’accompagnement de femmes enceintes qui se posent la question de confier leur bébé dès la naissance, car elles ne se sentent pas capables de l’élever, en raison de leur situation psychoaffective. Elle sait que c’est un sujet délicat sur lequel il faut éviter tout automatisme, et notamment ne pas cautionner l’idée que la précarité matérielle doive pousser une femme à renoncer à élever son enfant. 

Toutefois, l’Alliance voulait clarifier une contradiction : alors que l’IVG n’encourt que peu de « réprobation sociale » officielle (même si de nombreuses femmes s’en culpabilisent) l’idée de « l’abandon d’enfant » est largement l’objet d’une telle réprobation. On a tendance à considérer le traumatisme de l’IVG comme moins lourd que celui de confier un enfant à l’adoption, qui, certes, intervient plus tardivement. Telle n’est pas l’expérience de l’Alliance, qui, pour autant, ne néglige pas le caractère dramatique de certaines séparations néonatales, et la nécessité de les accompagner.

Le sondage exprime sur ce point un avis clair des sondées : 

-          pour 67% (et jusqu’à 76% des moins de 35 ans) « cela serait une bonne chose de mieux faire connaître à certaines femmes enceintes qui auront de lourdes difficultés personnelles pour élever leur enfant, la possibilité de le confier à l’adoption dès sa naissance ». 

L’adoption est-elle pour autant une alternative évidente à l’IVG ? Pas immédiatement ni automatiquement, mais en perspective. Pour le moment, la décision de confier l’enfant intervient plutôt en fin de grossesse, longtemps après que celle de ne pas avorter a été prise. Cette décision de confier un enfant est en balance avec celle de l’élever soi-même. Mais il pourrait en être autrement si on considérait davantage qu’on peut confier un enfant « pour son bien », comme ce fut le cas dans d’autres phases de l’Histoire. Cette analyse est confirmée par les travaux de psychanalystes qui estiment « l’abandon néonatal » injustement dénigré. 

4/ Oser dire que les relations sexuelles trop précoces sont la cause majeure de l’IVG chez les adolescentes. 

La croissance forte de l’IVG chez les mineures (+30% entre 2001 et 2007) préoccupe à juste titre les pouvoirs publics. Mais les solutions préconisées, jusqu’au niveau gouvernemental restent dans la ligne d’une surenchère d’information à connotation hygiéniste (sexualité réduite à la technique et à la promotion des modes de prévention sanitaires), qui nous semble en décalage avec les besoins réels des plus jeunes. On tend à rendre cette information de plus en plus précoce (désormais « dès la maternelle ») au risque d’escamoter la période de latence de l’enfant et d’installer l’idée illusoire d’une dissociation totale entre sexualité, affectivité et procréation.

-          51% des Françaises estiment que « les relations sexuelles trop précoces » sont parmi les deux raisons principales qui expliquent le taux d’IVG chez les mineures. 

Précisons que l’échantillon de plus de 1 000 femmes proposé par l’IFOP ne comprend que des majeures qui, pour un certain nombre, se réfèrent sans doute à leur propre expérience. A ce titre, les experts de l’IGAS ont justement noté qu’il y a un décalage entre les attentes des garçons et celles des filles, au moment de la toute première relation. La DREES a décrit en 2009 ce malentendu : les filles engagent volontiers tout leur être, et leur affectivité alors que, pour les garçons, c’est « une simple étape de jeunesse ». L’Alliance constate même que les filles se trouvent souvent psychiquement violentées par des gestes qui les instrumentalisent. 

Le sondage nous encourage à promouvoir une autre forme d’éducation sexuelle, impliquant les parents, et n’encourageant pas les plus jeunes à des relations sexuelles immatures, souvent traumatisante et par ailleurs risquées. Elles sont en effet pourvoyeuses de nombreuses IVG particulièrement dures à vivre pour les plus jeunes. Or, commencer sa vie sexuelle par un avortement est lourd de conséquence. 

Notons à ce titre que la diffusion massive des préservatifs, lors de l’irruption de la pandémie du SIDA s’est accompagnée de la croissance de l’IVG chez les plus jeunes en raison d’utilisations maladroites et de nombreuses ruptures. C’est pourquoi l’Alliance n’est pas en accord avec l’idée qu’il faille augmenter encore ce type de diffusion dont l’effet boomerang est démontré. 

Consciente que des parents sont défaillants, elle demeure attachée à ce qu’ils ne soient pas écartés systématiquement par les pouvoirs publics de l’éducation sexuelle et de tout ce qui touche à l’IVG comme c’est le cas actuellement. Comment, d’un côté, dénoncer le manque de repères et l’irresponsabilité parentale et, de l’autre, exclure les parents d’une compétence qui relève au premier chef de leur responsabilité éducative ?

par Tugdual Derville, délégué général de l’Alliance pour les Droits de la Vie

Pour aller plus loin

EllaOne : l'injustice faite aux femmes

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